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Rencontre avec Deheb « Black Keys Golden Chords » : l’art du beatmaking

Rencontre avec Deheb « Black Keys Golden Chords » : l’art du beatmaking

A l’occasion de la sortie de son dernier album, Deheb –  compositeur, musicien et Dj dans le style SOUL FUNK, FUNK 80’s, Hip Hop, Nu SOUL, Jazz FUNK, electro – a répondu à nos questions. Mais avant, faisons un tour d’horizon du parcours de ce talentueux beatmaker.

 

Qui est-il ?

Deheb, qui signifie « l’or » en arabe, a grandi en France, à Saint Malo. Il publie en 2001 sa première mixtape « La Chronique », sur laquelle il remixe certains des plus grands airs rap de l’année. 2004 était l’année de « Back to the Break » (avec le B-Boy Bonz), un mélange pour les B-Boys et Dj’s soul-funk old school. Puis en 2005, avec un projet acclamé par la critique « Lexxfiles » en collaboration avec le rappeur Lexxcoop.

Le disc-jockey français a vraiment commuté au beatmaking autour de 2004, avec une énorme influence funky. En 2006, il produit « Top of the block pt.2 » pour Apani feat Big Noyd. Cette première collaboration américaine marque un grand tournant de dans sa carrière et saisit cette chance en compilant ses collaborations dans un street album « The Goldsmith » ou apparaissent des MC’s comme Shabaam Sahdeeq, Dynas, Tiye Phoenix, Emilio Rojas, ou encore Sean Price. A la suite du Morceau « Why not » de ce dernier album, il a commencé à collaborer avec Dj Marrrtin au sein du combo « Funky Bijou » sur le label Stereophonk Records, produisant des breaks Funk et des bandes sons pour des trailers et events comme le Red Bull BC ONE depuis celui de Moscou en 2011, et surtout la finale mondiale qui a eu lieu à Paris en Décembre 2014.

Novembre 2015, est l’année de « Leaf ». Né d’une collaboration entre Deheb et Chief (un des producteurs hip-hop helvétiques les plus prolifiques). Originaire de Lausanne, Chief affiche une belle carrière solo, mais également internationale en collaborant notamment avec des MCs respectés tels que Moka Only, Aloe Blacc, Sene ou encore Blu. Il est aussi le fondateur du label Feelin’ Music, qui a révélé des perles suisses telles que Jazzo, MelodiesInfonie, Willy Sunshine ou plus récemment l’américain Maggz. « Leaf », situé au cœur des sonorités brésiliennes est leur première véritable collaboration sur long format. Et c’est le label Feelin’ Music qui s’est chargé de l’édition du disque. Artistiquement, le duo collabore sur commande pour des labels comme Cosmonostro et s’associe sur scène comme lors du Paleo Festival en 2013.

Aujourd’hui nous partons à la rencontre Deheb pour la sortie de son dernier opus « Black Keys Golden Chords », livré récemment en avril sous le label Feelin’Music. Vision originale et intelligente qui change la donne, mettant en avant-garde l’art du beatmaking.

Pour les fans de : Madlib, Stones Throw, Flying Lotus, Tribal Call Quest, …


 

Socialize Magazine | Tu as commencé ta carrière dans la musique en tant que DJ. Comment s’opère la mutation à Beatmaker ? Un artiste en particulier a éveillé ton intérêt pour cette discipline ?
Deheb | J’ai commencé le Djing vers 1997 suite à la rencontre de différents MCs dans la ville ou j’ai grandi. Je scratchais déjà un peu à l’époque, mais surtout j’adorais bidouiller des boucles de musiques avec deux postes K7 depuis l’âge de 12-13 ans. J’ai ensuite découvert le hip hop par le biais de mon grand frère qui choppait des K7 fin des années 80, et avec qui je regardais l’émission RapLine sur M6 dans les années 90. Par la suite, grâce à mon premier walkman et l’écoute au casque, j’ai plongé dans l’univers instrumental hip hop et j’ai tout de suite voulu comprendre comment ils “fabriquaient” cette musique hybride. Mes premiers mentors pour le beatmaking sont Pete Rock et DJ Premier pour la technique de “découpe d’échantillons”.

 

Penses-tu que le fait d’avoir évolué au contact direct avec la foule t’a permis d’aborder autrement ton approche au beatmaking ?
Je ne pense pas. Mon approche est plutôt liée à la pratique du bricolage dès le plus jeune âge. J’aimais beaucoup fabriquer mes jeux, mes jouets, démonter et remonter ce qu’on m’offrait (rires…).

 

A l’image d’un tailleur de pierre, Beatmaker est un travail minutieux. Quelle est ta définition du beatmaking ?
Bricolage sonore très orienté hip hop. C’est pour moi un des styles, voir le style musical, qui connait le moins de barrières éthiques et esthétiques. La liberté créative, en somme.

 

Explique-nous ton processus créatif ?
Ça a énormément évolué avec le temps ! Avant c’était sampler des batteries, les recomposer, pour y incorporer des échantillons de clavier, de basse, de cuivres, etc. Mais ces dix dernières années je joue toujours plus avec de vrais instruments. Aujourd’hui, je programme ou sample une batterie que je recompose puis j’improviser au piano, à la basse, ou à la guitare, ce qui me permet de donner une direction artistique avant de me lancer dans l’arrangement.

 

Longtemps tenus à l’ombre des rappeurs, les Beatmakers semblent aujourd’hui déterminés à briller à l’avant-garde des années 2010. Guts, Oster Lapwass, La Fine Equipe, Mani Deiz ou encore 20syl, font depuis quelques années le bonheur de ceux qui préfèrent demain à hier. Pourtant, malgré une certaine reconnaissance à l’étranger, votre art demeure encore peu reconnu en France ou en Suisse. Est-ce que l’on peut expliquer cela par le fait que la musique hip-hop instrumentale est un peu négligée ?
C’est un peu le cas dans tous les petits pays. De manière générale, même les plus grands producteurs ont acquis une réelle reconnaissance en passant par le chant ou le rap, Dr Dre, Kanye West, Pharrell williams…

 

Le fait d’avoir collaboré avec des artistes US tels que Dynas (qui a travaillé avec J Dilla – un des producteurs beatmaker les plus influent de l’histoire hip-hop), DJ Spinna, ou encore Apani B (qui a travaillé avec DJ Premier – producteur reconnu, aux collaborations prestigieuses avec des artistes tels que Mobb Depp, Nas, Jay-Z ou encore Kanye West), à certainement été très enrichissant. Quel impact ont eu tes collaborations US sur ton approche artistique ?
Déjà à mes débuts, j’essayais de m’imaginer produisant pour les plus grands artistes US de l’époque. Mes premières collaborations ont été d’une part un soulagement, mais aussi un encouragement. Quasi personne dans mon entourage artistique ne comprenait ma musique (rires…).

 

En termes de rap US quelles sont tes influences ?
Ouulaaa ! Il y en a un paquet, et quasiment dans toutes les époques 🙂

Le hip hop très funky du début des 80’s, les productions de Prince Paul (De La Soul), Dj Premier, Pete Rock, J Dilla, Madlib, Kanye West, Timbaland, Swizz Beatz, The Roots…

 

Et de manière générale que peut-on trouver dans ta playlist actuellement ?
Le nouveau Kendrick Lamar, Alaclair Ensemble, Iman Omari, Kaidi Tatham, Rejjie Snow, Frank Ocean…

 

Tes instrumentaux sont assez imagés avec un certain potentiel cinématographique. Après avoir produit des breaks Funk et des bandes sons pour des trailers et events d’envergure mondiale, tu as plus récemment travaillé sur la composition de la musique pour le film documentaire suisse « Bounty » (Sortie Suisse romande : 14 juin 2017) qui dévoile l’émergence d’une génération, à la culture hybride, à travers le quotidien de cinq personnages aux profils différents et combinant tant bien que mal ces deux identités « Noir et Suisse ». Riche de ses expériences, aimerais-tu davantage exploiter cette voie dans le futur ?
Oui clairement !  C’est même, à moyen et long terme, un travail avec lequel je désire mettre en perspective l’image et le son, la musique et la danse, l’un au service de l’autre.

 

La proximité géographique a franchement du bon ! Tu produis et joue en Europe avec Chief, l’un des producteurs hip hop helvétiques les plus prolifiques. Comment s’est faite votre rencontre et à quel moment as-tu décidé d’intégrer le label Feelin’ Music ?
On s’est connectés via le net. J’ai pris contact avec Chief afin d’organiser une rencontre lors de mon premier passage en Suisse, il m’a invité dans les bureaux de son label, et on a tout de suite sympathisé. Par la suite, j’ai passé une bonne année dans les studios Feelin’ Music à apprendre à mixer des productions hip hop (par le biais Chief), et de fil en aiguille, il m’a invité régulièrement sur ses morceaux. Mon “intégration” dans le label s’est donc faite très naturellement.

 

On s’intéresse beaucoup à ton travail de beatmaking, mais tu es également actif dans le milieu associatif depuis 1997. En possession d’une expertise en MAO, tu as travaillé au centre culturel « Le Triangle » de Rennes en tant que Médiateur Culturel de proximité. Peux-tu nous expliquer en quoi consiste une expertise en MAO, et si ton rôle de médiateur est indissociable de ton travail artistique ?
C’est assez indissociable en fin de compte. Mon expertise en MAO me permet de conseiller, de faire découvrir et d’enseigner les bases de la musique assistée par ordinateur, ce qui m’a obligé à une certaine maitrise du sujet pour être plus efficace et polyvalent. Cela a malgré tout influencé mon travail et mon écoute artistique, car j’ai dû élargir le champ de mes directions musicales, notamment en musique électronique.

 

L’or rend précieux ton nom puisqu’il en porte la définition. On le retrouve aujourd’hui sur ton dernier opus, puisque « Black Keys Golden Chords » se traduit par « Clés (touches) Noires Accords Dorés », et sa couleur doré illumine l’artwork. On le retrouve également sur ton album « The Goldsmith » (orfèvre), et peut également se laisser deviner sur « Funky Bijou ». Que représente l’or pour toi et qu’elle en est ton interprétation ?
Ma mère et ma petite sœur m’ont trouvé ce nom “Deheb” dont j’ai petit à petit assumé tout au long de ma carrière avec le maximum d’humilité possible, car la signification est à double tranchant. Pour moi la symbolique de l’or, c’est la valeur qu’il y a en chacun de nous. Dans mon cas, c’est la musique, et j’essaie de la partager au plus grand nombre. Pour d’autres c’est l’écriture, la cuisine le sport… Je ne sais plus dans quelle chanson j’ai entendu ça, mais ça résume bien ma pensée « Gold lives inside of you ».

 

« Gold lives inside of you » Kendrick Lamar – These Walls  

 

L’album, très solaire, reflète une réelle recherche de textures et synthétise des influences Hip-hop, Nu Soul, Jazz, Funk et Electro. Equilibré et intelligent, il jouit d’une réelle mixité et nous fait voyager au grès des sonorités urbaines faisant le pont entre hier, aujourd’hui et demain avec bienveillance. Dans quel état d’esprit as-tu abordé l’album ?
Merci pour le compliment ! J’avais accumulé pas mal de morceaux ces deux dernières années, et des collaborations qui me tenaient beaucoup à cœur étaient prévues de longue date. J’ai donc peaufiné le maximum de morceaux qui montraient une facette différente de ma personnalité musicale tout en mettant en avant mon entourage musical.

 

Sublimé par des collaborations avec Noza, Shungu, FlexFab, Elaquent, Cauzndefx, Scream, Chief, LNDFK, Seilen, Classik ou encore Calicot Jazz, on voyage géographiquement puisqu’il regroupe des artistes français, canadiens, américains, belges et suisses. L’industrie musicale démocratisée avec l’accès à internet, la citation « La musique rassemble les peuples » est plus vraie que jamais. Comment se sont réfléchit les collaborations ?
Aucune n’a été réfléchie au final. Ces des artistes avec qui j’ai échangé beaucoup humainement avant la moindre note de musique. La plupart sont des amis sauf pour Elaquent et Cauzndefx que j’ai sollicité via internet.

 

Incontestablement, la touche séduction de l’album se trouve auprès des collaborations féminines avec Calicot Jazz, LNDKF et Seilen. « Rebirth » nous mène aux sommets à coups de Boum bap jazzy. « Moonday » ! Ce morceau Nu Soul, sensuellement ensablés, nous fait littéralement fondre. Ou encore, avec le revitalisant « Nomoredrama ». Des morceaux élégants d’une grande délicatesse. Serais-tu un grand sensible ?
Ahahah… oui ! Pour moi TOUS les musiciens sont de grands sensibles. En tant que public ou spectateur c’est ce que l’on recherche à travers l’art, l’émotion, la sensibilité. Après, certains artistes ne l’utilisent pas de la même manière.

 

« Joke Upon You », sur un air wavy, invite à se lover tendrement. Est-ce de la relation que tu entretiens avec ton art dont tu joues ?
La musique fait partie de ma vie comme un pratique introspective et à la fois relaxante. Je ne peux pas passer beaucoup de jours sans en faire.

 

Vol direct pour la East Coast avec « From The Ground on up », ambiance Funky Chic, capable de faire sauter en l’air les plus réfractaires. Basses vibrantes et beats percutants sur « Flex ». Point commun entre ces deux morceaux… Chief et FlexFab, Beatmakers helvétiques. Un mot sur la scène beatmaking suisse ?
J’ai découvert avec étonnement le niveau de la scène suisse par le biais de Chief, et j’ai particulièrement accroché sur les producteurs dans la veine du label Melodiesinfonie, ou Unda de Sango basés en Suisse alémanique. La rencontre avec Hook et surtout Flexfab, dont je connaissais quelques morceaux, s’est faite naturellement car ils m’ont précédé en tant que stagiaires à Feelin’Music.

 

L’album, est une très belle réussite dans son ensemble, mais c’est indéniablement les morceaux « instrumental only » qui ont retenu tout notre attention. Les écoutes attentives successives, confirment l’impression de pénétrer dans un univers captivant. Tu as diffusé tout au long de l’opus des énigmes qui ont attisé notre curiosité. Et c’est bien là tout l’intérêt dans l’art du beatmaking : Esquisser l’intonation et les contours pour un développement narratologique musical. Le plus personnel est peut-être « Emerald Coast Ride ». Terriblement léger et apaisant, tu nous portes sur la Côte d’Emeraude en Bretagne, paysages qui t’ont vu grandir. As-tu envie de nous en dire plus ?
La région Nord Bretagne, et plus particulièrement le pays de St Malo est un coin qui me plonge à chaque fois dans la nostalgie. Ayant vécu un enfance et adolescence vraiment heureuse, c’est l’un des endroits où je me ressource le mieux.

 

« Looting » (pillage), est une déstructuration tribale au rythme colonial. « Slow Eagle », s’envole au-dessus du Grand Canyon au rythme des chants chamaniques indiens et nous laisse un goût de liberté volée. Des morceaux expressifs qui ne laissent quasiment aucun doute sur le ressenti inspiré par les écoutes. Mais c’est finalement l’intitulé du dernier titre de l’album qui délivre la clé (doré) et nous ouvre les portes du passé, confirmant ainsi l’impression des écoutes précédentes. « 1733 Nannytown », plus explicite, tel une bouteille à la mer, témoin échouée sur une plage, délivre le récit de celle que l’on nommait « vieille femme des rebelles Obeah ». Reine Nanny, décédée en 1733, héroïne nationale jamaïcaine, figure emblématique de la résistance d’esclaves échappés aux colonisateurs britanniques. Pourquoi avais-tu envie de nous parler d’elle ?
Pour être honnête, je m’intéresse beaucoup à la place du métissage dans notre société occidentale. Les blessures de l’esclavage et de la colonisation sont autant des sujets qui me touchent. Le hasard m’a porté sur l’histoire de cette figure emblématique de la Jamaïque par le biais du rythme. Shungu m’a envoyé toute une série de rythmiques dont une qui tournait a 173.3 BPM :). Google et mon imagination ont fait le reste. Merci d’avoir relevé la référence et d’aborder ce personnage !

 

Cela nous permet à revenir sur les pistes « Looting » et « Slow Eagle », qui portent en elles la même destinée. De quels peuples avais-tu envie de nous parler? Es-tu instinctivement un citoyen du monde ?
Je suis d’ascendance africaine et berbère et assez fier de mes origines africaines, même si j’ai toujours fait en sorte de me sentir chez moi partout dans le monde. J’aime l’idée de faire réfléchir, même à petite échelle, sur les relations qui ont fondé le métissage actuel ; le vol, le pillage, l’appropriation, mais aussi les choses positives comme l’échange culturel, le voyage. Toutes nos cultures sont liées et se doivent quelque chose. J’en apprends tous les jours 🙂

 

Au travers de ces trois morceaux, on a le sentiment viscéral de revivre l’histoire coloniale à travers les yeux des oppressés, libérant un message de paix. Est-ce la vision que tu avais envie de partager avec ton public ?
Je suis comme beaucoup de mes concitoyens, un habitant d’une troisième planète (rires), ni français, ni maghrébin. J’essaye de me mettre à la place de l’autre, mais sans vouloir faire la leçon à qui que ce soit. La musique est là pour s’évader, pour le reste, rien ne vaut les romans et les ouvrages historiques.

 

« Foeva », qui introduit l’album et vogue sur des sonorités japonisantes. Peux-tu nous raconter son importance de place première ?
C’est un morceau que j’ai fait d’une traite en deux-trois heures. Il n’a pas de signification précise, mais j’ai voulu inspirer des images d’infini, comme une sensation d’être hors du temps…

 

Malgré le grand nombre de collaborations, tu as réussi à rendre cette œuvre très personnelle. On devine dans ta démarche artistique un besoin de partage accru. Est-ce important pour toi ?
J’ai fait énormément de musique tout seul dans mon coin, alors disons qu’au niveau introspection j’ai eu mon compte (rires), et je ne conçois plus trop la musique comme ça. Je la compare vraiment à la cuisine autant dans ses aspects culturels comme de partage.

 

Peux-tu nous donner 3 mots qui définissent le mieux ton album ?
Amitié – Partage – Passion

 

Quels sont tes projets pour la suite ?
Sur le label Feelin’Music, j’ai deux EP six titres en collaboration avec une superbe chanteuse suisse, du nom de Seilen, qui sort en Juin, et un second pour la rentrée avec une amie Belge Penelope Antena.

 

Sur quelles scènes musicales on peut te retrouver prochainement ?
Je joue pour un festival de Danse et dans différents lieux à Nantes ou je suis installé depuis une bonne année, et actuellement je travaille à une nouvelle formule live pour la rentrée septembre.

 

Pour finir, qu’est ce qu’on peut te souhaiter?
De belles rencontres et de l’inspiration!

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