Dans un coin paisible de la Suisse, loin des projecteurs aveuglants des grandes capitales de la mode, Sébastien Strappazzon tisse, avec passion et détermination, une carrière unique dans le monde du design.
Cet artiste autodidacte, qui préfère se définir comme un « bidouilleur » plutôt que comme un créateur ou un designer au sens traditionnel, est aujourd’hui à la tête d’AVNIER, une marque de streetwear qui ne cesse de surprendre par ses collaborations audacieuses et son approche innovante.
Un parcours hors du commun
Né à Porrentruy, une petite ville suisse, Sébastien Strappazzon a grandi dans un environnement loin des strass et paillettes du monde de la mode. Dès son plus jeune âge, il est attiré par l’esthétique underground, influencé par la culture punk, skate, et rap. Cette influence marquera profondément son style et sa vision artistique. Il commence sa carrière en tant que plâtrier-peintre, un métier qui, loin de l’éloigner de ses aspirations créatives, lui permet de développer une approche pragmatique et manuelle du design.
Son entrée dans le monde de la mode ne se fait pas par les grandes écoles de design, mais plutôt par un travail acharné, des expérimentations et une passion indéfectible pour le textile. « Je ne suis pas un artiste au sens classique du terme. Je bidouille, je prends des éléments, je les mélange, et j’essaie de créer quelque chose de nouveau« , confie-t-il. C’est cette approche brute et authentique qui séduit ses premiers clients et qui, au fil des ans, lui ouvre les portes de collaborations prestigieuses.
La naissance d’AVNIER : une histoire d’amitié et de passion avec Orelsan
La création d’AVNIER est le fruit d’une rencontre décisive avec Orelsan, rappeur et réalisateur bien connu. « C’est grâce à ma première marque, Swan, que j’ai rencontré Orelsan« , raconte Sébastien. Ce dernier, déjà fan de la musique d’Orelsan, voit en lui un partenaire idéal pour une collaboration. Mais au lieu de se limiter à une simple association, Orelsan propose de créer une marque ensemble. C’est ainsi qu’AVNIER voit le jour en 2014, avec pour objectif de combiner leurs visions respectives dans une ligne de vêtements qui ne se contente pas de suivre les tendances, mais qui les réinvente.
AVNIER, contraction de « avant-dernier« , un nom qui reflète une certaine humilité, mais aussi une détermination à se positionner en marge des courants dominants. Dès ses débuts, la marque se distingue par ses collaborations inattendues, comme celle avec Salomon, ou encore avec la marque de tricot Saint James. « Nous avons voulu créer une marque qui n’avait pas de stratégie prédéfinie, où chaque collection naissait d’une envie de se faire plaisir et de surprendre« , explique Sébastien.
Les défis du début : apprendre sur le tas
Comme beaucoup de jeunes créateurs, Sébastien a dû faire face à de nombreux défis au début de sa carrière. Sans formation académique en design, il apprend tout sur le tas, accumulant les erreurs et les succès. « Je me souviens de mes premiers t-shirts que je faisais pour mes potes. Je ne savais même pas ce qu’était la sérigraphie à l’époque« , raconte-t-il en souriant. Mais c’est cette approche autodidacte, combinée à une persévérance sans faille, qui forge sa carrière. « Le plus dur, c’était de trouver des usines prêtes à produire mes vêtements selon mes spécifications. J’ai dû me déplacer, frapper à des portes, convaincre des gens de croire en ma vision. »
Aujourd’hui, cette ténacité porte ses fruits. AVNIER est devenue une marque reconnue non seulement pour son style, mais aussi pour la qualité de ses produits. Sébastien insiste sur l’importance de créer des vêtements qui durent, à contre-courant de la fast fashion. « Mon rêve, c’est que mes créations se retrouvent un jour dans des friperies, redécouvertes comme des pièces uniques. La durabilité est essentielle pour moi. »
Une créativité nourrie par l’évolution constante du monde
Lorsqu’on lui demande comment il parvient à rester créatif dans un monde en constante évolution, Sébastien répond avec une humilité désarmante. « Ce qui me stimule, c’est justement que tout bouge autour de nous. Il y a toujours des hauts et des bas, des moments où l’on perd un peu le fil, puis d’autres où l’on retrouve cet élan créatif. »
Pour lui, l’évolution rapide du monde est à la fois un défi et une source d’inspiration. « Nous sommes une jeune marque, nous devons constamment nous réinventer, avancer. C’est ce qui est stimulant« , confie-t-il. Il reconnaît également l’influence des jeunes générations qui l’entourent. « Les jeunes me motivent énormément. Ils ont une façon de penser différente, un engagement pour des causes importantes, et cela se reflète aussi dans la mode. »
L’avenir de Sébastien Strappazzon : vers de nouveaux horizons créatifs
Si Sébastien est fier de ce qu’il a accompli avec AVNIER, il ne compte pas s’arrêter là. Il nourrit le désir d’explorer d’autres domaines, d’étendre sa créativité au-delà des vêtements. « J’aimerais bien m’essayer à quelque chose dans le domaine culinaire, ou encore dans l’événementiel. Ce qui m’intéresse, c’est de créer des expériences, d’aller au-delà de la simple création de vêtements. »
Il imagine des collaborations multidisciplinaires où la mode ne serait qu’un élément parmi d’autres dans une expérience globale. « J’ai envie de créer des expériences où les vêtements ne sont plus la première lecture, mais viennent en complément d’un tout plus vaste« , explique-t-il.
Rencontrer Sébastien Strappazzon, c’est plonger dans un univers où la passion, la persévérance et l’authenticité se conjuguent pour créer une mode qui dépasse les simples tendances. C’est découvrir un artiste qui, malgré un parcours atypique, ou peut-être justement grâce à cela, a su s’imposer dans un milieu exigeant et en constante évolution. À travers AVNIER et ses projets futurs comme ses collaborations avec la Migros ou Lausanne-Sport, Sébastien continue de réinventer la mode, tout en restant fidèle à son ADN : une créativité nourrie par la vie elle-même et une curiosité insatiable pour ce qui l’entoure.
Pour ceux qui souhaitent se lancer dans le monde de la mode, Sébastien Strappazzon a un conseil simple, mais essentiel : « Entourez-vous bien, expérimentez, et surtout, ne perdez jamais de vue ce que vous voulez vraiment accomplir. »
Cette interview est issue de l’édition imprimée de Socialize Magazine, n°7
